jeudi, décembre 21, 2006

LA CEREMONIE DES CONTES ET LUMIERES A DISNEYLAND RESORT PARIS : Entretien avec le compositeur Vasile Sirli

Si les chœurs chantent « One man’s dream » tous les soirs, lors de la Cérémonie des Contes et Lumières au parc Disneyland, ce n’est certainement pas les rêves d’un seul homme que les célébrations de Noël à Disneyland Resort Paris illuminent. Bien au contraire, personne n’est insensible à la magie de ces fêtes, d’autant plus lorsqu’on se laisse envahir par l’enthousiasme et la féérie des musiques de la Cérémonie, que nous présente aujourd’hui son compositeur et directeur musical, Vasile Sirli.

La Cérémonie des Contes et Lumières nous propose l’association insolite de l'esprit de Chante, c'est Noël et de l'ambiance plus "comédie musicale " de One Man's Dream de Bruce Healey. Comment en êtes-vous arrivé à cette idée?
Je dois dire que je n'ai pas eu le moindre doute à propos de cette association. Si cela avait été le cas, nous aurions tout repensé. Depuis le début, le metteur en scène Christophe Leclercq avait cette idée d'aborder Princes & Princesses de façon à la fois contemporaine et classique. Aujourd'hui, un numéro de comédie musicale traditionnel fait partie du classicisme. Nous avions beaucoup d'options, mais je pense que c'est celle-là qui fonctionne le mieux. C'est aussi l'avis des artistes qui font ce spectacle. De plus, je respecte et j’admire beaucoup les musiques créées par nos collègues en Californie, en Floride ou à Tokyo. C’est ainsi que j'ai adapté One Man's Dream de Bruce Healey, directeur de la musique de Disneyland, en collaboration avec Christophe Leclercq, réalisateur et chorégraphe de ce spectacle. Ce numéro est dédié aux rêves que peuvent avoir les enfants, petits ou grands, d'un monde imaginaire de conte de fées avec des Princes et des Princesses, et cette chanson lui allait comme un gant.


Comment êtes-vous parvenu à intégrer One Man's Dream à l'intérieur de ce spectacle sur Noël?
Nous avons particulièrement soigné le rapport entre les musiques afin de ne pas voler la vedette au spectacle proprement dit. Le contraste entre les différentes musiques était quelque chose de désiré afin de bien signifier qu'il se passe quelque chose de nouveau, et qui marche malgré tout très bien avec l'idée de Princes & Princesses, qui faisait déjà partie intégrante du concept original pour Disneyland. Et en ce qui concerne le montage, nous nous sommes attachés à ce que le résultat soit le plus poétique et le plus artistique possible, ne serait-ce que par respect pour Bruce. On passe d’un style à l’autre un peu comme si l'on feuilletait les pages d'un livre.

Puis, le numéro s'enchaîne sur l'illumination de l'arbre proprement dite.
Exactement. Et c'est à cette occasion que la Fée Clochette est invitée pour diriger et lancer cette cérémonie d'allumage du Château et du sapin. Tout le parc en frémit!… Elle apparaît sur le Château, embrase l’arbre et joue avec les lampadaires. Musicalement, ce moment est basé sur deux musiques originales, introduites par le thème de Peter Pan. La première, Lumina, est une pièce instrumentale accompagnant l’illumination du Château, et la seconde, Ring The Bells, est un choral en synchronisation avec l’illumination des lampadaires. Les paroles sont de Jay Smith, et pour leur interprétation, nous avons fait appel aux mêmes artistes qui chantent des Carols dans le parc, les Disney Carollers.


Comment définiriez-vous le style très intéressant de Ring The Bells ?
Vous connaissez mon goût pour les métissages ! Je dirai que c’est entre le traditionnel anglo-saxon, sur des harmonies très calmes, et un swing jazz américain, le tout avec quelques petites notes ethniques qui me sont chères, des petites touches d’Europe de l’Est.

Pour sa troisième année consécutive, Chante, c'est Noël a toujours autant de succès !
Le fait que les visiteurs veuillent acheter le disque est un critère d'évaluation très important pour nous. Dès la sortie du single, nous avons vendu plus de 16 000 disques de cette chanson en quatre semaines seulement. Vendre autant de CDs en si peu de temps, sur une période où il sort beaucoup de choses dans le même esprit, et qui plus est sur un seul site : c'est assez exceptionnel! Nous étions extrêmement contents, comme vous l'imaginez. Mais nous serons tout aussi attentifs cette année, ce qui nous permettra de prendre des décisions pour l'année prochaine.

lundi, décembre 18, 2006

NOËL A DISNEYLAND RESORT PARIS : Entretien avec le show director Christophe Leclercq

Show director –et pour tout dire, un peu magicien-, Christophe Leclercq (Le Voyage Fantastique de la Fée Clochette, Wishes…) a créé cette année encore ce Noël de Contes de Fées à Disneyland Resort Paris. De la Parade de Noël (nocturne à partir du 23 décembre) à la Cérémonie des Contes et Lumières, la magie s’empare tous les jours du parc Disneyland, tandis que défilent les princes et princesses Disney, ouvrant la voie au Père Noël, et que d’un coup de poussière d’étoiles, la Fée Clochette illumine le sapin, les réverbères de Main Street, puis le Château de la Belle au Bois Dormant qui semble se couvrir de millions de diamants étincelants.
Un véritable voyage magique, avec le meilleur des guides !


Monsieur Leclercq, d’où vous est venue votre inspiration pour La Parade de Noël ?
Comment ai-je pu imaginer cette parade blanche, or et argent ?… En fait, je me suis replongé dans mes souvenirs d’enfance. Etant natif du Nord de la France, Noël est synonyme de blanc, celui de la neige qui recouvrait le jardin. Petit, j’allais aussi souvent dans les greniers de mes grands-parents, et une fois je suis tombé sur une collection de vieilles boîtes à musique. Je les ai ouvertes, et à l’intérieur, j’y ai trouvé de petites poupées de porcelaine peintes à la main, avec des costumes différents qui tournaient au son de ce carillon. C’est de là que m’est venu l’idée d’utiliser les chars comme des boîtes à musique, avec les princes et princesses en lieu et place des poupées. Puis, en songeant à ces couples princiers, j’ai pensé à la richesse et j’en suis venu à utiliser l’or et l’argent sur des costumes très blancs.

Chaque parade raconte une histoire. Quelle est celle de La Parade de Noël ?
La Parade de Noël est en fait un écrin de velours sur lequel défilent nos princes et princesses. La première boîte à musique est consacrée à Mickey et ses amis. Elle est très victorienne et vraiment caractéristique dans la mesure où les personnages se retrouvent sur une sorte de proscenium surélevé avec une grosse clef dorée et une petite statue qui tourne sur le devant du char. C’est la boîte à musique en couleur qui annonce l’arrivée de notre écrin à bijou en velours : les princes et princesses. Et pour refermer cette parade, on retrouve le Père Noël, dont le traîneau est tiré par de vrai rennes, mais aussi le petit tambour sur son cheval de bois, avec tous les soldats de bois qui représentent pour moi les jouets de la hotte du Père Noël. On a donc de la couleur au début, de la couleur à la fin, et le velours blanc au milieu. C’est donc une sorte de présentation de boîtes à musique, tout en restant très Disney puisque nous avons utilisé en fait nos chars redécorés dans les même tons.

De Cendrillon à Aladdin, c’est en effet un fabuleux défilé de princesses. Mais qu’en est-il de Mary Poppins ?
C’est vrai que ce n’est pas une princesse. Mais la réponse m’est apparue quand j’ai commencé à réfléchir sur le line-up, la succession des chars : elle avait tout naturellement sa place juste avant les rennes du Père Noël car le traîneau survole tous les ans les toits de Londres. De fait, chaque char occupe une place bien précise dans cette histoire, et pour des raisons bien précises. C’est ainsi que j’ai voulu que le char le plus long, celui de Cendrillon, soit le premier des princes et princesses. A priori, l’idéal aurait été de commencer par la Belle au Bois Dormant, mais le char est un dragon, un peu violent pour ouvrir une telle parade ! Dans ces conditions, autant commencer par une jolie citrouille et ces chevaux qui gallopent, tirant finalement dans leur sillage toutes les autres princesses…

Comment avez-vous créé cette parade ?
Tout d’abord, nous sommes partis de chars existant. A nous de les rendre attractifs pour telle ou telle saison. C’est ainsi qu’on les décore façon Halloween pour la Parade des Méchants et façon Noël pour cette saison. J’en ai longuement parlé à notre designer des costumes, Sue Lecash, en lui disant que ce serait vraiment bien que nous ayons une parade de Noël avec des costumes. Pas simplement une musique de Noël avec des décorations de Noël clinquantes, en restant dans le rouge, le vert et le jaune, avec les mêmes costumes que pendant l’été. Le blanc était tellement représentatif de Noël pour moi que je lui ai demandé si elle serait d’accord pour créer des costumes de cette couleur. Elle a trouvé cela fabuleux. Et quitte à faire, si on créait des costumes blancs pour les artistes au sol, on pourrait aussi adapter ceux des princes et princesses sur les chars, tout en gardant la coupe standard. Sue s’est alors mise tout de suite à dessiner, et ce sont ses dessins qui ont tout déclenché. On les a montrés à la direction et je leur ai dit : « voilà, parade blanche, nouvelle musique, nouvelle chorégraphie, tout le monde passe en blanc, or et argent. » Et quand j’ai commencé à sortir les croquis, ils ont fait « Waow ! ». Je leur ai alors dit : « oui, vous pouvez le dire. Moi, avant les dessins j’avais l’image en tête, mais quand je les ai vus sur papier, là je me suis dit qu’on avait un beau produit pour Noël, quelque chose de neuf qui n’avait jamais été fait ailleurs. » Ce sont les costumes qui ont convaincu tout le monde et qui nous ont permis de renouveler ainsi notre saison.

Musicalement, on est passé du Casse-Noisettes de Tchaïkovski à un répertoire créé spécialement pour le parc par Vasile Sirli, Chante, c’est Noël.
Vasile m’a demandé : « cette parade, tu la vois comment ? Comment tu la ressens ?» Je lui ai alors présenté les dessins des costumes, et raconté mon histoire de boîtes à musique et je ai dit qu’il faudrait peut-être une musique du genre système à ressort, « click-clack, click-clack ». De plus, la parade devait avancer, s’arrêter, s’avancer, s’arrêter, sans arrêt, comme un accordéon. Il fallait donc quelque chose d’assez répétitif, qui tourne un peu sur lui même, à l’image des petites poupées. Car, à un moment donné, les personnages ont tous une chorégraphie identique, qu’on retrouve sur chaque unité. Vasile m’a alors dit : « je vois ce que tu veux dire. Et, tu sais, quelque chose qui ferait très Noël, dans cet esprit, ce serait d’avoir des voix d’enfants. » C’était une excellente idée, d’autant plus qu’il avait l’habitude de travailler avec la Maîtrise des Hauts-de-Seine. Ces derniers ont accepté tout de suite, et on a reçu ces 15 gamins qui ont merveilleusement chanté cette chanson en français et en anglais. Ces petites têtes blondes si turbulentes dans le « break room », la salle de repos, ont changé brusquement d’attitude sous la houlette de leur chef de chœur et ont donné le meilleur d’eux-mêmes en très peu de prises. On a vraiment travaillé main dans la main avec Vasile. Dès la première démo, il avait compris tout l’esprit du morceau et toute la structure en accordéon dont j’avais besoin pour la mise en scène de la parade.

Quelles furent les implications de cette nouvelle musique sur la chorégraphie de la parade ?
Les choses ont bien changé par rapport à ce que l’on faisait d’habitude. Auparavant, c’était assez classique. Là, on est plus revenu à un défilé de costumes, même si c’est chorégraphié. Il y a beaucoup de fontaines, tout en avançant. J’ai voulu quelque chose de simple, de smart, de class. Pas trop dansé parce que la musique est très douce et que je voulais que la parade glisse littéralement sur le sol. C’est comme si les poupées avaient les pieds liés et qu’elles étaient sur un rail. Je ne me suis pas lancé dans des choses trop « hystériques » ( !), à part pour les ramoneurs, pour lesquels je me suis permis de sauter un peu en l’air ! Si on regarde bien les lords et ladies avec La Belle au Bois Dormant, les crinolines et manteaux avec Cendrillon, les orientaux avec Aladdin, on s’aperçoit que cela courrote parfois, mais cela marche finalement beaucoup : ça glisse tout seul. Ce tapis blanc enneigé qui sert de décor à la parade agit aussi comme une sorte de patinoire. De fait, c’est une autre façon de travailler, mais aussi d’expliquer aux danseurs le style qu’on voulait obtenir, et ils ont tout de suite adhérer. Il faut dire que la Parade de Noël est quelque chose de très reposant, tant pour le public que pour les performers. C’est une chorégraphie beaucoup moins fatigante que celle de la Parade des Princes & Princesses, qui les emporte vers un univers cotoneux, doux et chaleureux.

Comment avez-vous choisi le sens de la parade ?
La Parade de Noël sort de It’s A Small World et parcourt son trajet pour sortir à Town Square-Main Street Est, tout à côté de Kodak. On pourrait la faire démarrer de Main Street, c’est sans soucis, y compris du point de vue musical. Je le vois d’autant mieux que lors des répétitions le soir, je ne fais que des allers-retours. C’est plus compliqué pour Fantillusion, dans la mesure où il y a un programme avec des arrêts bien précis pour respecter les différentes zones musicales. Etant donné que, dans Fantillusion, il y a trois arrêts et trois actes différents –donc trois musiques différentes-, sans compter les voix de characters comme Jafar ou Maléfique, on peut aussi aller dans les deux sens de ce point de vue, mais c’est plus compliqué car il faut une programmation différente à chaque fois. La différence, c’est qu’on part de Main Street pour aller vers It’s A Small World quand il n’y a pas de feu d’artifices. Dès qu’il y en a un, on a le parcours inverse car les gens suivent toujours le dernier char. Pour nous, le choix de ce sens facilite la clearance, la privatisation de Fantasyland et de Castle Stage pour pouvoir tirer le feu, pour des raisons de sécurité. Maintenant, vu que nous sommes plus libres pour La Parade de Noël, je dirai que je préfère démarrer d’It’s A Small World pour descendre Main Street. Pourquoi ? Parce que, si je me place dans Main Street, je vois automatiquement dans ma ligne de vue les chars qui s’alignent avec le Château derrière. L’important pour moi, c’est qu’on voie une parade avec son château derrière. C’est le plus bel axe qui existe !

A partir du 23 décembre, les horaires de la parade changent, ce qui fait qu’elle va défiler de nuit.
C’est une belle première ! On va donc utiliser notre système d’éclairage, qui n’est pas sur les chars, mais sur la route de la parade : les parade poles. C’est un système qui n’est pas visible par les visiteurs. Cela marche comme la musique : c’est une programmation. Les chars vont sortir de It’s A Small World et le premier char va pousser la musique devant lui, d’une certaine façon. C’est ce qu’on appelle une ouverture de zone. Et à chaque fois qu’on passe une zone, on ouvre une fenêtre, qui elle-même va ouvrir les haut-parleurs sur lesquels on va lancer les annonces « dix minutes », « cinq minutes », juste avant la « show announce » qui enchaîne avec la parade. Cette dernière est lancée informatiquement par le char qui pousse la musique devant lui. 150 mètres devant le char, l’annonce est diffusée, avec la musique de la parade juste après. Puis la parade rentre dans cette zone, tandis que les danseurs sont en synchronisation parfaite avec tout cela. C’est le même principe pour les Parade Poles qui se mettent en fonction lors des ouvertures des fenêtres musicales. Dès que l’annonce démarre, les mâts camoufflés dans les toits de Main Street, dans le préau à pop corn de Central Plaza ou encore dans les tours devant Castle Stage, vont se soulever et les projecteurs s’allumer. Il nous arrive de monter les parade poles quand les journées sont un peu grises. Cela permet de donner un peu de luisance aux bâtiments et à la rue, cela fait un peu plus chaleureux.

Comment avez-vous envisagé cette nouvelle lumière ?
Nous répétons toujours de nuit, ce qui fait que je connais bien les effets de la lumière sur les costumes et les chars : c’est flamboyant ! Nous allons faire un petit réglage de la lumière. Bien qu’on reste en plein feu, je ne voudrais pas que l’on mette de gélatine colorée sur les projecteurs, comme on l’a fait pour la parade d’Halloween. Pour la Parade de Noël, il faut absolument que le blanc soit réhaussé.

Venons-en maintenant à la Cérémonie des Contes et Lumières, qui triomphe cette année encore sur Central Plaza. Comment tout cela a-t-il commencé ?
Ma première source d’inspiration a été les Légendes. Je me suis dit que j’aimerais bien avoir des elfes sur scènes. C’est la raison pour laquelle nous avons créé le Jardin des Contes. Pour moi, c’est vraiment la scène centrale avec son tapis de neige autour et ses boules de Noël. C’était un peu dommage d’avoir un décor aussi exceptionnel que le Château et de ne rien avoir sur Central Plaza. Il fallait raconter quelque chose ici et en faire le point de départ de l’illumination du sapin. De là, nous en sommes venus aux princesses et l’idée m’est venue de faire de chaque boule une icône de chaque princesse : la pomme, le soulier, la robe enchantée et la couronne. Et nous avons bien fait de penser à cela car les gens adorent ! Puis, au fil du temps, le concept a évolué. Au début, c’était le Père Noël et les elfes, qui est devenu Princes & Princesses avec Mickey et ses amis venus faire un « Christmas swing-along ».

Quelle histoire cette cérémonie raconte-t-elle ?
Nous avons alors imaginé Minnie comme maître de cérémonie et qui va amener ses copains pour chanter des chants de Noëls connus de tous. Mais dans le même temps, notre compère Dingo veut fabriquer son arbre de Noël. Sur ces entrefaites, Mickey arrive avec une grande surprise : c’est son amie Clochette qui va illuminer le Château. Sa poussière d’étoile descend le long du Château, parcourt le Jardin des Contes, scintille sur les lampadaires et les toits de Main Street pour mieux exploser de mille feux sur le sapin, de retour à Town Square. A partir de là, pour mieux replonger les visiteurs dans l’esprit de ce Noël familial et chaleureux au coin de la cheminée, nous avons eu l’idée d’une nouvelle chanson originale, Ring The Bells, pour accompagner l’illumination des lampadaires. On s’est dit qu’on avait sous la main des chanteurs lyriques de tout premier ordre et qu’on pouvait faire appel à eux pour cette production. Ce qui fait que tous les jours, les Christmas Carollers s’entendent chanter !…Enfin, on éteint le programme sapin-lampadaires pour retourner au Château, et là c’est l’apogée avec l’illumination du Château.

La Cérémonie est plus courte cette année que l’année dernière.
On pourrait faire mille choses avec les princesses, mais à cette époque de l’année, il fait froid, et les gens ont attendu debout parfois pendant une heure pour avoir une bonne place. Il nous fallait donc quelque chose d’énergique, de percutant, de coloré, et de pas trop long. Nous avons donc opté pour une cérémonie de 12 minutes, et cela semble satisfaire tout le monde. L’année dernière, nous avions eu d’excellents échos, mais les gens trouvaient que c’était long, malgré tout. Il y avait un prologue avec des danseurs en costume victorien. Beaucoup on d’ailleurs pensé que c’était Mary Poppins ! Pour éviter la confusion, on a donc décidé de supprimer cette partie. De la même façon, en ce qui concerne les princesses, on a décidé de se concentrer sur One Man’s Dream, de raccourcir à peine la musique pour mieux parler de Disneyland, du Château, de la rencontre des princes et princesses, de garçons qui savent voler comme Peter Pan, de marionnette comme Pinocchio. Cette année, les gens se disent « c’est déjà fini ? ». Mais il vaut mieux cela que s’ennuyer.

L’autre grande nouveauté, c’est le changement de place du sapin, qui regagne Town Square !
Grande victoire ! Le sapin était à Town Square depuis l’ouverture du parc ! Il faut savoir que le sapin est le même depuis 15 ans, que c’est toujours la même technologie : des ampoules à réchauffement, avec un filament. Ce qui a son charme, mais le fait est que le Château et les lampadaires sont traités aujourd’hui en LED, une technologie puissante et solide, et totalement différente. Quand on a commencé à travers sur la Cérémonie, le problème de la place du sapin s’est posé : soit on assistait à la cérémonie depuis Town Square, on ne voyait pas le Château car les arches bouchaient la vue, soit on y assistait depuis Central Plaza et on ne voyait plus le sapin. C’est la raison pour laquelle j’ai suggéré de changer le sapin de place. On a alors lancé les travaux, on change le sapin de place, et on passe une année comme cela, et ça fonctionne. Or, l’année d’après, on me dit : plus d’arches, on développe un nouveau concept de lumière. Les lampadaires arrivent. D’un coup, je me retrouvais avec un champ de vision totalement ouvert depuis Town Square : on voyait le Château, mais on ne voyait plus le sapin. En remettant le sapin à son emplacement original, on avait deux icônes de part et d’autre du champ de vision, et toute la cérémonie était visible. C’est ce que j’ai suggéré cette année, et tout le monde a été d’accord avec moi !

Quant aux lampadaires, ils sont différents de l’an passé.
J’ai en effet reprogrammé le tout, ce qui prend des nuits et des nuits car il faut prendre en compte le temps de réchauffement de l’ampoule (parfois jusqu’à 15 minutes), ce qui complique passablement le tout. De plus, on n’est plus simplement en blanc ; on est en bleu et blanc. Avant, c’était joli, mais on ressentait une certaine froideur avec tout ce blanc, à peine réchauffé par ces camays dorés. Aujourd’hui, avec la possibilité de changer les couleurs à l’intérieur du pilier imaginée par notre designer lumière, on obtient une profondeur inédite. Il fallait changer des guirlandes pour réhabilitation, et ce fut l’occasion de tenter de nouvelles expériences. On a fait des essais sur un lampadaire et tout le monde a été convaincu !

Que peut-on vous souhaiter pour ce Noël ?
Tout simplement la santé, pour pouvoir créer toutes ces choses, mais également pour pouvoir profiter de ma famille que je vais retrouver avec bonheur pour les fêtes !

samedi, décembre 16, 2006

LE MONDE DE NARNIA - EDITION ROYALE : Entretien avec le compositeur Harry Gregson-Williams

« Le Mal se change en bien
Aussitôt qu’Aslan revient,
Au bruit de son rugissement
Disparaissent tous les tourments
Quand il montre ses dents,
L’hiver meurt sur le champ,
Et dès qu’il secoue sa crinière
Le printemps renaît sur la terre.
Le jour où la chair d’Adam, où les os d’Adam
Siègeront sur le trône de Cair Paravel,
Le temps des malheurs cessera complètement.
»

Telle est, noble compagnon, la prophétie très ancienne que l’on se raconte de génération en génération de Narniens, et révélée en 1950 A.D. (2555 en années narniennes) par l’écrivain britannique Clive Staples Lewis dans LE LION, LA SORCIERE ET L’ARMOIRE MAGIQUE, deuxième volume des CHRONIQUES DE NARNIA.
Or, par la crinière du Lion, voici qu’un grand prodige a eu lieu l’année dernière : les magiciens du monde de Disney ont réellement découvert Narnia et ont pu accompagner Peter, Susan, Edmund et Lucy Pevensie dans l’accomplissement de la prophétie.
Rendons grâce en cela à Andrew Adamson, fils d’Adam qui avait déjà accompli l’exploit de filmer des créatures magiques, tel un ogre vert, et qui a su immortaliser avec déférence et passion le monde de Narnia, la beauté époustouflante de sa nature, la vie foisonnante et fantastique des animaux qui le peuplent et les aventures épiques qui l’ont secoué…
Rendons grâce également à cet aède merveilleux, Harry Gregson-Williams qui, à l’image d’Aslan, a engendré par la seule puissance de son chant le monde de Narnia, déployant tout son talent, tout son art, à créer le son unique de Narnia, à nul autre pareil…
«Narnia, Narnia, Narnia, réveille-toi. Aime. Pense. Parle. Que les arbres marchent. Que les bêtes parlent. Que les eaux divines soient

Comment a débuté votre travail sur LE MONDE DE NARNIA?
J'ai eu la grande chance de pouvoir travailler par le passé avec Andrew Adamson sur SHREK et SHREK 2. Nous avons fait notre petit bonhomme de chemin ensemble déjà. Et quand on lui a demandé de faire ce film, ce fut naturel pour lui de faire de nouveau appel à moi. J'en ai été positivement ravi, puis il a disparu pendant plusieurs moi en Nouvelle Zélande pour le tournage. Pour moi, la composition de la musique a véritablement commencé en mai 2005 et c'est terminée le 2 novembre de la même année.

En trois films, comment ont évolué vos relations avec Andrew Adamson?
LE MONDE DE NARNIA est vraiment très différent des deux SHREK. Avant tout, dans SHREK, il y avait un certain nombre de chansons dont il fallait tenir compte. Le résultat est que le 1 ne comporte que 45 minutes de musique et 60 minutes pour le 2. LE MONDE DE NARNIA comporte plus d'une centaine de minutes de musique. Nous sommes dans le cadre d'un film en prises de vue réelle, avec de l'imagerie informatique, et un sens épique très développé. Au fil des films, ma relation avec Andrew a évolué de merveilleuse façon. C'est un musicien, il est guitariste, et il s'occupe lui-même de ses musiques temporaires. Il comprend parfaitement l'impact de la musique dans un film et est très ouvert, dans le sens où il m'autorise à aborder des scènes de façon inattendue, pas forcément évidente, ce qui donne lieu à pas mal de discutions passionnantes car il a des idées plus directes de mises en musique d'une scène.

Quelles furent ses demandes pour LE MONDE DE NARNIA?
J'ai passé six mois en Angleterre l'année dernière à composer la musique de KINGDOM OF HEAVEN pour Ridley Scott, et à cette époque, il m'a appelé de Nouvelle Zélande pour me dire "ne dépense pas tous tes thèmes épiques pour ce film ; gardes-en pour NARNIA!" A part ça, il ne m'a pas demandé de choses spécifiques. Il m'a laissé regarder les premiers montages librement de telle sorte que je puisse surtout me familiariser avec les personnages, et expérimenter différentes approches musicales. Ce n'est qu'à la fin de ces tests que nous avons trouvé ensemble le son de NARNIA.

Quand on pense aujourd'hui à l'heroic fantasy, c'est LE SEIGNEUR DES ANNEAUX qui nous vient immédiatement à l'esprit. Quelle est la spécificité du MONDE DE NARNIA?
J'adore l'œuvre de Tolkien et l'adaptation qu'en a fait Peter Jackson. Seulement, cet univers est extrêmement sombre, ce qui n'est pas le cas de notre film. On y trouve certes quelques ombres. Ainsi, le personnage le plus sombre est la Sorcière Blanche, et nous avons souhaité la dépeindre de façon originale. Lors du tournage, Andrew a noté que c'était certainement l'un des tout premiers personnages de ce type, repris et repris maintes fois par la suite à Hollywood comme avec Cruella D'Enfer, par exemple. C'est la raison pour laquelle nous avons cherché une autre approche qui prenne en compte cette allure et ce charisme qui se dégagent de ce personnage à l'écran. Et l'on comprend que le plus jeune frère Pevensie tombe sous son charme et va jusqu'à trahir sa propre famille pour elle. J'ai eu beaucoup de plaisir à travailler sur son thème car, précisément, il n'est pas d'une seule pièce. Il cumule un côté sombre évident, mais en même temps renferme des éléments de séduction très intéressants.
Mais cette noirceur n'est pas l'essentiel de notre propos. Il s'agit avant tout d'un film sur la famille. Quatre enfants disparaissent dans ce monde fantastique et se retrouvent séparés. Ce n'est qu'à la fin du film qu'ils sont réunis. Chacun d'entre eux doit faire une sorte de voyage initiatique, mais ils doivent également le faire ensemble. Cela se ressent nettement dans ma manière d'aborder le film musicalement. Il fallait que ma musique soit très personnelle, très intime, axée sur un personnage en particulier à certains moments, et épique et grandiose à d'autres.

Les enjeux artistiques et financiers sont très importants sur ce film, ne serait-ce que par rapport à l'éventualité de suites. Comment se sont passées vos relations avec Disney par rapport à cela?
Andrew est non seulement le réalisateur du film, mais également son producteur exécutif, ce qui nous a donné une grande autonomie. Tout l'aspect musical a été élaboré par lui et moi, et aucun exécutif de Disney ne s'en est mêlé. Je leur en suis vraiment très reconnaissant. Nous avons eu leur soutien total. C'est une grande compagnie qui a la réputation d'avoir un grand contrôle sur leur production. Ce ne fut pas mon cas : nous avons vraiment eu carte blanche.

LE MONDE DE NARNIA possède le plus grand nombre de créatures de l'histoire du cinéma. Partant de là, quelle fut votre stratégie en matière de thématique?
Ce fut très intéressant. Ma stratégie a été de ne pas me limiter à des thèmes de personnages, mais de composer également des mélodies pour le lieu lui-même. J'ai ainsi commencé à travailler sur un thème qui exprimerait la beauté de Narnia. Il faut dire qu'Andrew est parvenu à donner une beauté éblouissante à ce monde, et mon inspiration est venue d'elle-même à partir de là. Ce thème incarne la beauté et les espoirs de Narnia. Quelques jours après l'avoir écrit, j'en discutais avec Andrew, et je me suis rendu compte que ce thème ne possédait pas tout ce que je voulais y mettre. Je suis donc retourné au début du film, au moment de l'arrivée de Lucy à Narnia. Le premier personnage qu'elle rencontre est Mr. Tumnus, moitié faune, moitié homme. Pour ce moment en particulier, mon thème me paraissait inapproprié. C'est ainsi que j'ai écrit un deuxième thème pour Narnia, que nous avons appelé The History Of Narnia. C'est une sorte de mélodie folk, mais je ne voulais pas que cela sonne spécifiquement irlandais ou écossais. Je voulais donner le sentiment au public, au moment de cette arrivée, de ce passage à travers l'armoire magique, que Narnia était là des milliers d'années avant nous et faire ressentir le fait que Narnia possède sa propre histoire, millénaire. Ce fut une révélation pour moi. De fait, Narnia avait deux dimensions : l'une, historique et l'autre liée à sa beauté pour les Pevensies.
En ce qui concerne les thèmes des personnages, il m'a semblé évident de commencer par Lucy Pevensie, la plus jeune. Elle est adorable, au-delà des mots. C'est aussi le catalyseur de tout ce qui arrive dans le film. Elle fait immédiatement confiance aux créatures qu'elle rencontre, qui, en retour, lui font également confiance. Puis je me suis intéressé à l'aîné, Peter, qui devient très héroïque à sa façon. Son thème croît tout au long du film pour culminer dans le dernier acte. Il y a aussi un thème pour Mr. Tumnus, que j'ai écrit il y a environ un an et demi. Andrew était en Nouvelle-Zélande et il m'a appelé pour me dire qu'il devait tourner une scène dans laquelle ce personnage jouait de cette flûte mythique, un peu comme une flûte de pan, et que je devais écrire tout de suite la musique de cet instrument dans la mesure où il voulait que l'acteur qui jouait Mr. Tumnus joue vraiment sur ma musique. Je me suis donc d'abord intéressé à cet instrument en forme de W, ni tout à fait une flûte, ni tout à fait une clarinette et j'ai fini par choisir le duduk, cet instrument antique à anche double. J'ai ensuite composé une sorte de berceuse que j'ai envoyée par internet à Andrew. Nous avons travaillé ainsi pendant une semaine. Puis je n'ai plus entendu parler de lui pendant un an. Ce n'est qu'à son retour de Nouvelle-Zélande que j'ai pu constater que mon thème était présent dès la première scène tournée. Vient ensuite Aslan. En fait, pendant une grande partie du film, on en parle plus qu'on le voit –la rencontre avec les enfants n'ayant lieu que bien plus tard-. J'ai voulu profiter de l'occasion pour créer une sorte d'anticipation en musique, et son thème apparaît chaque fois qu'il est évoquer, et notamment lorsque les blaireaux parlent de la prophétie de Cair Paravel et de la venue des Fils d'Adam et des Filles d'Eve pour libérer Narnia de la Sorcière Blanche. C'est ainsi que le thème d'Aslan, avant que le Lion n'apparaisse effectivement à l'écran, est devenu en même temps le thème de la prophétie. Mais je ne le livre en fait dans sa pleine dimension que lorsque la rencontre se produit enfin, ce qui permet de la dramatiser de façon très intéressante.

Il y a beaucoup de références bibliques dans LES CHRONIQUES DE NARNIA. Les avez-vous intégrées à votre partition?
Cet aspect des CHRONIQUES m'intéresse beaucoup. Cependant, Andrew a tenu à ce que nous abordions ce film sans référence particulière à cet aspect de l'histoire. On trouve certes dans ma musique certains échos sacrés, notamment à travers l'utilisation du chœur, mais c'est une dimension qui n'est pas du tout soulignée. Par exemple, pour la scène du sacrifice d'Aslan, j'avais écrit une pièce pour chœur très triste, et Andrew m'a dit que ce moment possédait une dimension religieuse par lui-même et qu'il ne fallait pas en rajouter. Il m'a donc demandé d'écrire une musique certes triste, mais par tous les moyens possibles à l'exception du chœur.


Le film s’ouvre sur la guerre avant de nous faire pénétrer dans le monde de Narnia. Comment avez-vous traité ces différents univers ?
Le monde réel ne représente en gros que le premier quart d’heure du film, avant que nous ne découvrions Narnia aux côtés de Lucy. Le début du MONDE DE NARNIA est assez violent et sombre : ce sont les bombardements de Londres la nuit. C'est un moment très intense et troublant pour les enfants qui sont très rapidement envoyés à la campagne pour être protégés de la guerre. Une fois que l'on arrive à Narnia, l'orchestration est comme transformée. Nous ne sommes plus dans le monde réel. Cela se ressent notamment par l'utilisation de flûtes ethniques de toutes sortes. Ce sont des sonorités exotiques, mais j'ai tenu à ce qu'on ne puisse pas les lier à un lieu géographique précis : ce n'est ni asiatique, ni celtique. C'est narnian, tout simplement.

Le film regorge de moments intenses. Quelle scène vous a le plus inspiré?

Je dirais celle dans laquelle les enfants sont couronnés rois et reines de Narnia. C'est un moment d'une grande intensité émotionnelle. Quand j'ai commencé à mettre en musique cette séquence, j'avais déjà composé à peu près 90 minutes de musique et j'avais tous mes thèmes. Ce fut une sorte de merveilleuse apothéose et un immense plaisir! Je crois que si j'avais eu à l'écrire au début de la production, j'aurais été terrifié! Mais là, j'étais plutôt impatient!

Cette partition signe une nouvelle et magnifique collaboration avec la vocaliste Lisbeth Scott.
Lisbeth est une remarquable chanteuse, avec une voix magnifique. Mais elle n'est pas que cela : elle est aussi une remarquable musicienne de studio. Je l'ai appelée pour lui dire que j'avais besoin d'elle pour une interprétation très particulière : ni tout à fait des mots, ni tout à fait une mélodie. Elle est alors venu à mon studio et nous avons commencé à expérimenter des choses. Elle a tout de suite compris ce que nous essayions de faire dans ce film. Elle apparaît dans quatre ou cinq pièces, quand je ne voulais pas de chœur, mais bien plutôt une voix solo qui puisse se fondre dans l'orchestration.

Quelle est son rôle dans votre musique?
Elle apparaît dans les scènes incluant la petite Lucy. Lisbeth a une voix qui dégage cette sorte d'innocence de l'enfance qu'incarne si magnifiquement la plus petite des Pevensie.


Un autre de vos collaborateurs récurrents n'est autre que Hugh Marsh, au violon électrique.
Certaines personnes sont effrayées par l'idée d'un violon "électrique". Je ne sais pas comment d'autres peuvent employer les talents de Hugh, mais de mon côté, je l'utilise pour sa sonorité merveilleusement chaleureuse. Dans ma partition, il est très difficile de dire que c'est un instrument électrique. J'ai fait appel à lui pour le thème History Of Narnia dont nous parlions tout à l'heure. Comme pour les flûtes ethniques, j'ai voulu que cette sonorité ne soit pas identifiable, tant du point de vue de sa nature "électrique" que du fait-même qu'il s'agit d'un violon. J'aime beaucoup cette ambiguïté. Et quand Hugh en joue, cela devient très évocatif.

Là où LE SEIGNEUR DES ANNEAUX revendiquait magnifiquement ses influences celtiques, votre approche tient plus du mystère et de la magie…
C'était le challenge du MONDE DE NARNIA. LE SEIGNEUR DES ANNEAUX a fortement marqué les esprits et il fallait donner à cet autre film d'heroic fantasy sa propre sonorité, créer de toute pièce un monde musical spécifique.

Vous avez fait appel à un orchestre américain de 75 musiciens et à un chœur londonien de 140 chanteurs. Pouvez-vous nous parler de ces choix d'effectifs pour le moins originaux.
Je ne pense pas que la question de la taille de orchestre soit pertinente. Un orchestre de 75 musiciens est un grand orchestre ; un orchestre de 120 musiciens est ridicule, inutilement cher et prétentieux. Et puis il faut prendre en compte la taille de la salle. Nous avons enregistré le Hollywood Studio Symphony à Todd AO, ce qui était parfait pour un ensemble de cette taille. Pour moi, ce qui est beaucoup plus pertinent, c'est la taille du chœur. J'ai rencontré le Bach Choir au moment de KINGDOM OF HEAVEN. J'ai tellement apprécié leur travail que je me suis dit que si j'avais besoin d'un grand chœur pour LE MONDE DE NARNIA, c'est à eux que je ferais appel de nouveau. Et c'est ce que j'ai fait. Le fait est qu'ils ont su donner une interprétation d'une puissance inouïe pour la scène de la bataille. Cette masse de chanteurs est tellement importante que le résultat est bouleversant.

Êtes-vous impliqué dans la chanson du film, I Can't Take It In?
Absolument. J'ai eu la chance de travailler avec Imogen Heap, du groupe FrouFrou, sur cette chanson présente dans le générique de fin.

Et dans la version longue du film, l' Edition Royale en dvd?

Pas du tout.

Votre participation à PRINCE CASPIAN a été confirmée. Avez-vous commencé à travailler sur le film?

Pas encore. Pour l'instant, j'ai lu le script et commencé à réfléchir aux directions musicales que je pourrai prendre cette fois. Je ne devrai commencer à écrire de la musique qu'à la fin de l'été prochain.

Quel effet cela vous-fait-il d'envisager ainsi de retourner à Narnia?

Je suis très impatient! J'estime que j'ai beaucoup de chance de faire ainsi partie de cette grande saga!

mardi, décembre 12, 2006

CARS - QUATRE ROUES EN DVD : Entretien avec le compositeur Randy Newman

La Route 66 est la route la plus célèbre au monde. Longue de 2448 miles, elle traverse huit états et trois fuseaux horaires depuis Chicago jusqu’à Los Angeles et les côtes pacifiques. Ouverte en 1926, cette véritable « Main Street » de l’Amérique, comme John Steinbeck la surnomma dans Les Raisins de la Colère, fut le chemin vers l’Ouest pour les migrants de la Grande Dépression, la route des convois de troupes durant la Seconde Guerre Mondiale et le principal axe routier pour les vacanciers des années cinquante, époque des stations-service rutilantes, des néons illuminant les motels et des petits restos familiaux.
Symbole du désir d’une nation insatiable en quête de liberté et de sensations mécaniques, la Route 66 a été célébrée au cours des années par des auteurs comme Jack Kerouac (On The Road, écrit en 1957, l’année de naissance de John Lasseter) ou encore par des musiciens comme le fameux crooner Nat King Cole dans Get Your Kicks On Route 66. 80 ans après sa création, la « mère de toutes les routes » brille aujourd’hui dans son tout dernier rôle, en accueillant CARS –QUATRE ROUES, mis en scène par un de ses plus grands fans, John Lasseter.
Pour l’accompagner musicalement dans cette aventure, le nouveau gourou de l’animation Disney a fait appel à son compagnon de route habituel, Randy Newman. Et quand il affirme que « CARS est l’une des meilleures partitions que Randy ait jamais écrites », nous aquiessons sans détour.
Alors, en piste pour une rencontre exclusive avec Randy Newman, un compositeur qui en a sous le capot et qui met de la magie dans son moteur…
A vos marques… prêts… partez !



« LONG AGO, NOT SO VERY LONG AGO »

L’histoire de CARS, QUATRE ROUES touche John Lasseter de près à titre personnel. Il a grandi à Los Angeles, et lorsqu’il était enfant, il aimait aller chez le concessionnaire Chevrolet où son père dirigeait le service des pièces détachées. Il a lui-même travaillé aux stocks dès qu’il a eu 16 ans.
Il se souvient : « J’ai toujours adoré les voitures. Je dois avoir dans les veines un mélange de dessins animés Disney et d’huile de moteur… Aujourd’hui, j’ai enfin réussi à réunir mes deux passions : les voitures et l’animation. Lorsque Joe Ranft (co-réalisateur du film, et légende Disney décédé l’année dernière) et moi avons commencé à parler de ce projet en 1998, nous savions déjà que nous voulions créer une aventure dont les héros seraient des voitures. A peu près à la même époque, nous avons vu un documentaire, « Divided Highways », qui avait pour sujet une autoroute inter-états et la manière dont sa construction avait affecté les petites villes. Nous avons été émus par ce documentaire et avons commencé à songer à ce que cela devait être de vivre dans ces lieux que le passage de l’autoroute avait plongés dans l’oubli. C’est là que nous avons vraiment entamé nos recherches sur la Route 66. »
A cela s’ajoute une véritable aventure humaine et familiale, qui a donné au film toute sa substance. Durant l’été 2000, la femme de John Lasseter, Nancy, l’a convaincu de prendre des vacances bien méritées. Toute la famille s’est embarquée à bord d’un camping-car, et est partie pour deux mois sur les petites routes, loin des grands axes, entre le Pacifique et l’Atlantique. « Lorsque je suis rentré, j’avais resserré les liens avec ma famille, nous étions plus proches que jamais. J’ai soudain réalisé que je savais de quoi allait parler notre film… J’ai découvert que le parcours que l’on fait dans la vie contient sa propre récompense. C’est formidable de réussir à faire des choses, mais quand vous y parvenez, vous voulez avoir vos amis et votre famille avec vous pour fêter ça… Joe a aimé cette idée et notre histoire a vraiment commencé à prendre forme. Notre héros, Flash McQueen, ne s’intéresse qu’à une seule chose : être le plus rapide. Rien d’autre ne compte pour lui que sa victoire au championnat. C’était le personnage idéal pour qu’on le force à ralentir, comme moi j’ai dû le faire pour mon périple en camping-car. Pour la première fois de ma carrière, j’ai levé le pied, et c’était extraordinaire. Les histoires des films que nous faisons chez Pixar viennent toujours du cœur. Elles naissent de choses personnelles, de choses qui comptent pour nous et nous émeuvent. C’est cela qui leur apporte leur richesse d’émotion et leur donne un véritable sens. »
Quant à la collaboration de John Lasseter avec Randy Newman, c’est aussi une belle histoire humaine, une histoire d’amitié et de confiance entre deux hommes, deux artistes.

M. Newman, votre partition pour CARS – QUATRE ROUES carbure magnifiquement !
Merci beaucoup. J'espère seulement que mon travail aide le film. C'est toujours un plaisir de collaborer avec les gens de Pixar. Ils font un travail tellement remarquable… ce qui n'est pas si fréquent de nos jours!


Depuis MONSTRES ET Cie, cela fait un certain temps que nous n'avons pas eu le plaisir de vous retrouver sur un dessin-animé. L'animation vous a-t-elle manquée?
A vrai dire… pas vraiment! Je crois que j'ai pas mal donné en la matière, et c’est un genre beaucoup difficile à manier, beaucoup plus complexe qu'un film en prises de vue réelles. Pour me décider, il me fallait vraiment quelque chose de nouveau, quelque chose que je n'avais jamais fait auparavant. Avec CARS, j'ai pu expérimenter en matière de musique bluegrass et de fanfare. Le jeu en valait vraiment la chandelle! Et puis, ce film a été beaucoup moins fatigant que les autres dessins-animés que j'ai faits car les personnages n'ont pas de pieds, ce qui fait qu'il y a moins de pas à accompagner, moins de doubles croches, et donc moins de notes!…

Quel a été le facteur décisif de votre retour ?
Tout simplement le fait que John Lasseter me l’ait demandé. Je n’ai eu que des bonnes expériences avec lui, et avec les gens de Pixar en général. J’ai fait quatre films avec eux, et ce fut un immense plaisir car les quatre étaient excellents. Sans compter les deux autres. Six grands films d’affilée, c’est rarissime. C’est la raison pour laquelle je retravaillerai toujours avec John Lasseter, tout comme avec Jay Roach, le réalisateur de MON BEAU-PERE ET MOI et de sa suite. Même si j’ai plus d’attirance pour le drame que pour la comédie, Jay est quelqu’un de si exceptionnel que je referais n’importe quoi avec lui. Certes, il faut que le projet soit intéressant sur le plan musical, mais la personne qui le dirige est capitale. Je suis prêt à faire tout ce qu’un réalisateur me demandera de faire si tant est que nous sommes sur la même longueur d’onde sur le plan humain.


MY HEART WOULD KNOW

Pour John Lasseter, « Personne ne sort d’une salle de cinéma en disant ‘wow, la technologie était géniale’. Personnellement, j’aime les films qui me font pleurer, parce qu’ils dégagent une émotion vraie. C’est ce que j’ai souhaité pour CARS – QUATRE ROUES. Je voulais que les gens s’amusent et rient. Mais je voulais aussi faire vibrer leur corde sensible. »
C’est bien dans cet esprit qu’a travaillé Randy Newman, qui s’y entend quand il s’agit de faire vibrer les cordesde l’orchestre… et la nôtre.

À la première écoute de votre score, la première impression n'a rien à voir avec le monde de l'automobile. Au contraire, votre partition témoigne d'une grande humanité.
Je suis ravi que vous ayez remarqué cet aspect. Au-delà des images, c'est une histoire humaine qui nous est racontée. Il ne s'agit finalement ni de mécanique, ni de machines. Le film raconte l'aventure de quelqu'un qui vient d'un monde qui vit à cent à l'heure et obsédé par la célébrité, et qui découvre un monde totalement contraire, marqué par la lenteur.

C'est cette opposition qui semble avoir structuré votre partition toute entière.
En effet. Le pendant musical à cette opposition visuelle et narrative était inévitable. Vous avez d'un côté la vitesse et le tape-à-l'œil avec la guitare électrique et des cuivres puissants, et de l'autre un univers sonore qui tourne autour de la guitare acoustique. Il fallait que ce choc des cultures vous saute aux oreilles. C’est de là que naît la force émotionnelle du film.

A l’instar des héros du court-métrage Disney de 1952, SUSIE, THE LITTLE BLUE COUPE (qui a beaucoup inspiré John Lasseter), une grande partie de l'émotion passe par ces grands yeux qu'ont tous les personnages, véritable "pare-brise" de l'âme. Quelle fut votre source d'inspiration quant à la dimension humaine et émotionnelle de CARS?
Il se trouve que chacun de ces héros a une personnalité très marquée, tout comme des humains dans un film en prises de vue réelles. Les situations qu'ils rencontrent sont aussi très réalistes et très humaines. Ce n'est dont pas nécessairement les personnages eux-mêmes qui m'inspirent, mais plus largement ces situations dans lesquelles ils se retrouvent impliqués. Ma réponse est déterminée par ce que je vois, et de ce point de vue, je ne m’intéresse pas tant à la personnalité d’un personnage en particulier qu’à l’interaction entre ces personnalités. C’est ainsi que Flash McQueen est un petit gars très vif qui pense qu’il n’a besoin de personne. Au début du film, il est incroyablement égocentrique. Or, ce n’est pas lui qui m’a intéressé mais bien le fait qu’il se retrouve coincé malgré lui à Radiator Springs, une ville aux antipodes de sa vie, une ville oubliée du reste du monde au milieu de nulle part, peuplée d’excentriques qui vivent à deux à l’heure ! Ce sont des ruraux, et le fossé qui les sépare de Flash a été une grande source d’inspiration pour moi. Il y a aussi la nature d’une scène. Prenez une poursuite. Il y en a une dans le film impliquant une immense machine agricole. Machine agricole + poursuite : musicalement, cela a donné banjos et guitares + orchestre. Il faut dire que j’ai eu la chance de bénéficier de superbes musiciens, à commencer par les guitaristes Dean Parks and George Doering.




McQUEEN AND SALLY

De Woody à Buzz, en passant par Tilt, Atta, Sulli, Bob, Boo et bien d’autres, chaque film Disney-Pixar est un réservoir impressionnant de personnages plus attachants les uns que les autres. Aujourd’hui, avec Flash McQueen, Doc Hudson, Sally, Mater, Fillmore, Sarge, Ramone, Flo et les autres (sans oublier Luigi et Guido !), CARS-QUATRE ROUES est un monde foisonnant de personnalités hautes en couleur, touchantes et inoubliables. Un bonheur à haut indice d’octane !

Comme toujours dans les films Disney-Pixar; on trouve énormément de personnages. Comment avez-vous construit votre thématique par rapport à ce nombre considérable de protagonistes ?
Comme vous le sous-entendez, on ne peut envisager d'avoir un thème pour chacun des personnages tant ils sont nombreux. Cependant, certains personnages sont tellement bien campés qu'ils ressortent par rapport à l'ensemble. Je pense à Luigi et Guido, dans leur magasin de pneus, mais également à Mater, avec cette lenteur toute rurale, ou encore à Sally, la Porsche 911. Cette dernière a son propre thème qui apparaît la première fois qu'on la voit, mais surtout, je lui ai écrit un thème d'amour, pour elle et Flash McQueen. Ensuite, je me suis dit qu'il serait intéressant d'avoir un thème pour la ville de Radiator Springs elle-même, un motif dérivé de la chanson. Car, plus important que les personnages, c'est le lieu où ils vivent qui m'a inspiré. Chaque personnage est d'une certaine façon conditionné par son lieu d'origine, et c'est ainsi que j'ai organisé mon orchestration : fanfare et guitare électrique d'un côté, timbres doux et acoustiques de l'autre.


Est-ce la raison pour laquelle Flash n'a pas vraiment de thème?
Absolument. Ce qui le définit au début du film, c'est le monde dont il est issu : un monde moderne et tape-à-l'œil. Flash a bien un motif pour lui, lorsqu'il est dans la course, mais ce n'est qu'un dérivé de la fanfare et du rock'n roll de cet univers.


SH-BOOM

En 2001, John Lasseter, Joe Ranft, la productrice Darla Anderson, les créateurs des décors Bob Pauley et Bill Cone, et plusieurs autres membres clés de l’équipe de production se sont rendus à Oklahoma City. De là, ils sont partis dans quatre Cadillac blanches pour un voyage de neuf jours sur la Route 66. L’historien et écrivain Michael Wallis a dirigé cette petite expédition, leur a fait découvrir les lieux et présenté les gens qui rendent cette route si spéciale.A chaque étape du trajet, l’équipe a d’abord observé la « patine » des villes, et la richesse des textures et des couleurs. Ils ont étudié les publicités peintes sur les côtés des bâtiments, passées par les intempéries ou recouvertes en partie. Ils ont observé les formations rocheuses et les nuages, la végétation, tout ce qui fait l’univers de ces petites villes à l’écart des grandes routes.
Ils se sont fait également des amis avec les personnages atypiques et irrésistibles qui vivent sur les bords de cette route. C’est ainsi que le personnage de Mater a été créé par Joe Ranft d’après une vieille dépanneuse à l’abandon, déocuverte à Galena, Kansas, et à la suite de sa rencontre avec un certain Dean Walker, figure locale au fort accent du Sud, tout fier de pouvoir tourner ses pieds à 180 degrés !
Chaque visite, chaque rencontre a apporté un regard, une couleur supplémentaire au film et à son histoire, tout comme les multiples expériences musicales de Randy Newman lui ont permis de nous offrir un voyage sonore à nul autre pareil…

L’un des secrets de Pixar réside dans les recherches approfondies qu’ils ont réalisées avant de faire le film, que ce soit au niveau documentaire ou au cours de voyages sur la Route 66. Quel fut votre mode d’approche de l’univers du film.
J’ai fait des recherches, moi-aussi. Je suis allé voir du côté des premiers orchestres de swing de l’Ouest, de Bob Wills (1905-1975) et autres Milton Brown (1903-1936, CF) : un jazz très primitif et très intéressant, et parmi les toutes premières expériences en matière de guitare électrique. J’ai également écouté Flatt & Skruggs et d’autres albums dans le genre. J’ai toujours aimé ce type de musique et j’ai beaucoup appris en faisant ces recherches. D’un autre côté, je me suis plongé dans les grandes œuvres orchestrales du répertoire classique : Aaron Copland, Richard Strauss, Witold Lutoslawki et Richard Wagner.

Qu’est-ce que Richard Wagner vient faire dans la Piston Cup ?
C’est un orchestrateur tellement remarquable ! Songez au NOUVEAU MONDE, le dernier film de Terence Malick. On y trouve une longue citation de L’OR DU RHIN, quelque chose comme 25 minutes. Pour moi, c’est le meilleur moment du film ! (rires). Pour CARS, je n’ai pas repris directement ses orchestrations comme sa façon d’utiliser les cors ou les tubas, mais c’est toujours utile de se replonger dans son œuvre. Cela vous permet de trouver de nouvelles solutions.

Il poussait les instruments dans leurs derniers retranchements, dans les limites de leur tessiture, et c’est un peu ce que vous faites par moments.
C’est aussi ce que faisait Gustav Mahler. C’est une technique que j’ai beaucoup utilisée dans mes précédents films pour Pixar, beaucoup moins sur ce dernier car je devais surtout tenir compte de la façon dont les moteurs des voitures sonnent. Ma préoccupation principale était plutôt de me faire entendre en passant outre leur bruit qui se situe plutôt dans le médium, ce qui fait que je me suis davantage concentré sur l'énergie et la puissance des timbres que sur les tessitures. C’est certainement ma partition la plus présente de tous mes Pixar. Sur les autres films, la musique était très en retrait. C’est tout le contraire ici.

De fait, votre partition est extrêmement cuivrée, en particulier dans les séquences de courses. Cela a-t-il un rapport avec l’aspect métallique des héros de cette histoire ?
Ce ne fut pas tant un effet de style qu’une nécessité pratique. Dans le tumulte de la course, avec le bruit des moteurs, deux flûtes n’auraient pu passer. Il fallait beaucoup plus de puissante. Lorsque les effets sonores sont très bruyants et que vous voulez être entendu – c’est-à-dire que vous pensez que la musique a vraiment quelque chose d’unique à apporter à cette scène-, il est presque inévitable de songer aux cuivres, aux cordes à l’unisson, ou bien core aux bois écrits très aigus, avec beaucoup de trilles. Aujourd’hui, la jeune génération comme Hans Zimmer ou, par moments, James Newton Howard, privilégient les graves, et chargent l’orchestre dans ce sens. Dans CARS, cela n’aurait pas marché. J’ai donc opté pour les cuivres. J’ai eu le sentiment que c’était ce que le film demandait, c’est ce dont il avait besoin.


En parlant de couleurs musicales, que pensez-vous de ce qu’a fait votre cousin, Thomas Newman, sur LE MONDE DE NEMO ?
NEMO est encore un film très différent dans la mesure où il se situe sous l’eau. En conséquence, Thomas a choisi une approche plutôt atmosphérique. Et tout en ayant cette approche, il a réussi à impliquer la musique dans l’action. Car j’estime que, même si les personnages du film vont plutôt lentement, comme s’ils flottaient dans l’espace, on ne peut pour autant les laisser bouger sans commentaire musical. Cela ne veut pas dire pour autant refaire du Carl Stalling, mais trouver un juste milieu. En ce sens, je trouve que sa musique aide beaucoup le film, ce qui est, je pense, essentiel. Qu’en pensez-vous ?

Nous avons beaucoup apprécié son approche coloriste et contemporaine de la musique de dessin-animé.
Je crois que c’est une bonne définition. Il a un style bien à lui qui s’est très bien intégré dans le monde de Nemo. Cela fonctionne très bien, tout comme l’approche jazzy de Michael Giacchino pour LES INDESTRUCTIBLES.


THE BIG RACE / DIRT IS DIFFERENT

« La musique que Randy a écrite pour CARS-QUATRE ROUES reflète les deux mondes du film, explique John Lasseter. Le monde moderne où tout ce qui compte, c’est d’aller vite, et celui de Radiator Springs, où la seule chose qu’ils ont, c’est du temps. Tout est plus lent là-bas, et Randy traduit cela par un mélange de bluegrass, de jazz et de pure Americana. Le monde de la course, lui, est surtout illustré par le rock. » Une opposition entre la ville et la campagne qui gouverne tout le film, moteur de l’histoire, moteur de la musique…



Lors des séquences de course, vous avez intégré des éléments issus du rock, guitare électrique et batterie. Comment les avez-vous sertis à l’intérieur de l’orchestre ?
Il existe une véritable tradition d’intégration du rock dans l’orchestre symphonique, remontant probablement aux Moody Blues. Cette fusion est notamment possible à travers les basses, électrique et acoustiques, qui peuvent aisément se doubler. Avec la guitare électrique, c’est un petit peu différent. Une seule guitare peut sonner comme deux orchestres. Mais en même temps, cela ouvre toutes sortes de possibilités de dialogue : avec les cuivres ou avec les violoncelles. Vous savez, les courses de stop-cars ici aux Etats-Unis, sont toujours retransmises sur un fond de Heavy Metal. Il est vrai que cela passe très bien. Mais on n’entend jamais d’orchestre symphonique. Je me suis donc dit qu’on devait essayer. Or, cela pose des problèmes si on veut faire quelque chose d'un peu dramatique -au sens théâtral du terme-, notamment à cause du fait que l'orchestre ne peut être aussi présent, du point de vue de l'enregistrement, qu'un synthétiseur ou une guitare électrique, qui prennent tout de suite le devant de la scène et qui vous sautent immédiatement aux oreilles. C'est ainsi que, dans le film, la première course commence par la chanson de Sheryl Crow. Puis les moments d'action pure sont repris par la guitare électrique. Enfin, les moments dramatiques sont joués par l'orchestre, lorsqu'on suit ces personnages dans leurs exploits, dans leurs aventures ou leurs mésaventures. C'est le genre de choses qu'on ne peut pas exprimer avec une grille de rock'n roll basée sur une structure répétitive et immuable de quatre mesures. La musique d'animation demande beaucoup plus de flexibilité, afin de suivre au plus près ce qui se passe à l'écran.

Comment vous êtes-vous organisé pour les enregistrements?
En fait, la plupart du temps, le groupe de rock a été enregistré à part, avant l'orchestre. Ce n'est qu'ensuite que nous avons rajouté l'ensemble.

Pouvez-vous nous parler de l'autre aspect du film, celui plus populaire de Radiator Springs?
Compte tenu du fait que la Route 66 traverse tous les Etats-Unis d'Est en Ouest, Flash McQueen aurait pu atterrir n'importe où. Seulement, le fait est que John Lasseter a voulu que la population de Radiator Springs soit empreinte de la culture texane et du style de vie de l'Ouest américain. Cela s'entend par exemple dans la façon de parler des habitants. Si Flash avait débarqué dans une ville de l'Arizona, cela aurait été aussi intéressant de se tourner vers la culture hispanique avec bongos et autres. Mais ces gens sont vraiment des gens de l'Ouest, des gens de la campagne pour la plupart, vivant dans une ville typiquement américaine. A partir de là, le bluegrass était naturel.

La mandoline fait partie intégrante du folklore américain, et vous êtes passé de façon très amusante du bluegrass à l'Italie pour Luigi et Guido!
C'est un duo d'Italiens un peu stéréotypé, mais extrêmement drôle. Je crois d’ailleurs que ce sont mes personnages préférés dans le film. Tony Shalhoub (MONK) fait la voix originale de Luigi : il est irresistible! Lui et Guido ne s'intéressent qu'à une chose : les Formule 1. C'est vraiment un duo de dessin-animé. Leur humour est tellement exagéré qu'on ne pourrait l'imaginer dans un film en prises de vue réelles. Et finalement, musicalement, ce fut assez délicat car il ne fallait rien dénaturer. Je me suis donc d'abord orienté vers le CAPRICCIO ITALIEN de Piotr Illitch Tchaïkovski. Cela m'a beaucoup plus, et les gens de Pixar ont bien aimé, eux aussi. Puis j'ai également pensé à la mandoline, plus simple et plus directe. Il fallait bien doser l'ensemble car l'exagération est finalement plus délicate qu'on le pense.



De même que pour le rock, comment s'est passée l'intégration du bluegrass dans l'orchestre symphonique, comme par exemple dans le très beau New Road?
Les solistes, guitares et mandolines, sonnent naturellement très bien avec l'orchestre symphonique. J'ai donc procédé comme pour un concerto, avec les solistes d'un côté, et les cordes et les bois de l'autre.

Cela donne une profondeur inédite et magnifique à la musique traditionnelle américaine.
C'est exactement ce que m'ont dit les gens de Pixar, et c'est exactement ce qu'ils désiraient : montrer cette profondeur dans cet univers populaire. Personnellement, je trouve que la musique bluegrass avait déjà, à sa façon, cette profondeur. Mais ils ont vraiment voulu la souligner pour la rendre accessible à tous, même à ceux qui ne sont pas familiers de ce style.

Votre traitement des bois dans les séquences de Radiator Springs est à ce titre très délicat : comme quoi les habitants de Radiator Springs ne sont pas si rustres!
Cette ville est abandonnée depuis si longtemps que l'arrivée d'une nouveauté est comme une renaissance pour eux. Chaque instrument à vent est un peu comme un personnage qui renaît tout doucement. C'est un aspect dont je suis très fier pour sa belle fusion entre l'histoire et la musique.


WHEN SOMEBODY LOVED SONGS

Si Disney a pu insister auprès de Pixar pour qu’il y ait trois chansons dans TOY STORY, force est de constater que la nouvelle génération d’animateurs par ordinateur n’est pas très encline à inclure des airs dans ses films (LE MONDE DE NEMO, LES INDESTRUCTIBLES). Et pourtant, toute règle a ses exceptions, et CARS-QUATRE ROUES possède son lot de mélodies, originales ou reprises.
Du côté des nouveautés, Sheryl Crow transmet toute la fièvre de la course dans la séquence d’ouverture du film avec Real Gone, une nouvelle chanson qu’elle a écrite avec le producteur John Shanks, tandis que Brad Paisley, grand nom de la country, a écrit deux chansons pour le film, Find Yourself et Behind the Clouds.
Côté, reprises, on peut entendre deux classiques. Le célèbre groupe de country Rascal Flatts chante une nouvelle version de la chanson de Tom Cochran, Life Is A Highway, alors que le chanteur et guitariste John Mayer, lauréat de plusieurs Grammy Awards, a repris le standard de Bobby Troup de 1946, Route 66. La bande originale du film comprend aussi des chansons de Hank Williams (My Heart Would Know), Chuck Berry (Route 66) et The Chords (Sh-Boom).
Sans oublier la sensible et nostalgique Our Town, composé par le grand Randy…

CARS présente beaucoup plus de chansons que les précédents Pixar. Pouvez-vous nous parler de votre contribution en la matière?
Il est vrai que beaucoup d'artistes issus de la country ont participé à ce film : Rascal Flatts, Sheryl Crow, Brad Paisley… C'est inhabituel, mais ce n'est pas une mauvaise idée dans ce cas. Les créateurs du film ont pris beaucoup de précautions afin que les chansons ne ralentissent pas l'action et n'interfèrent pas avec elle. Il arrive qu'elles apparaissent par-dessus un dialogue, mais sans jamais altérer la compréhension. Our Town, la chanson que j'ai écrite pour ma part, est une sorte d'évocation de ce qu'était Radiator Springs dans le passé, une façon d'expliquer la situation à McQueen et au public en même temps. Ce qu'elle était autrefois et ce qu'elle est devenue aujourd'hui. Ce phénomène doit aussi exister en France. Quand ils ont construit l’autoroute de Nashville, certains villages ont été contournés et ont dépéri. Les commerces, qui sont le cœur d’une communauté, ont fermé. C’est ainsi que certaines villes sont florissantes et d’autres se meurent, comme Radiator Springs. Au début, John m’a fait un tableau très précis de ce qu’ils voulaient, j’ai composé en fonction de leurs descriptions, et les gens de Pixar ont animé en fonction de la chanson. Cela se passe exactement de la même façon à chaque fois et je suis toujours émerveillé du résultat à l’image. Je me rappelle notamment de When Somebody Loved Me dans TOY STORY 2. J’étais inquiet à propos du fait du fait que les plus jeunes, les enfants de 3 à 5 ans, puissent ne pas se sentir concernés par ce genre de ballade lente, et par les problèmes d’une adolescente qui oublie progressivement sa poupée. Et pourtant, ça a marché ! Ce sont de tels professionnels, et John Lasseter a un tel instint pour la musique. J’avais peur d’écrire une ballade, mais comme ils me l’ont demandé, je l’ai fait parce que je savais qu’ils savaient exactement où ils voulaient en venir, ils étaient sûrs de la force de leur histoire.

Si CARS possède son propre univers musical, beaucoup de gestes musicaux de sa partition nous renvoient avec tendresse et nostalgie aux précédents Pixar que vous avez faits.
Il est vrai que l'aspect "western" de Radiator Springs n'est pas sans rappeler l'univers cowboy de "Western Woody" et ses amis ("Woody's Roundup"). De plus, s'il y a de l'héroïsme dans CARS, il y en a dans tous les autres films, quand les choses se passent bien pour les différents personnages. Mais le parallèle s'arrête là. Certes, QUATRE ROUES est truffé de références visuelles aux autres Pixar, et notamment à TOY STORY (le "Lightyear" sur les roues de Flash, ou encore le « 95 » -l’année de sortie du film- qu’il arbore). Mais le fait que les TOY STORY se passent majoritairement en intérieur alors que CARS se passe majoritairement en extérieur a changé beaucoup de choses dans mon approche. Cela m'a demandé d'élaborer un tout autre univers sonore. Par exemple, moi qui suis très attaché au piano, je me suis dit que ce n'était pas une bonne idée ici car le piano me semble évoquer davantage l'intérieur que l'extérieur.




THE FINISH LINE

Toute bonne histoire a sa morale, et CARS n’y fait pas exception, comme nous l’explique John Lasseter : « Dans QUATRE ROUES, il s’agit avant tout de s’amuser avec un film plein de couleur et de bonne humeur. Mais c’est aussi une histoire très émouvante dont le propos est de dire que ce qui compte dans la vie, c’est le voyage lui-même. Cela n’a rien à voir avec la destination. L’essentiel, c’est de profiter de ce qu’on a ici et maintenant. » Une philosophie qui n’a pas laissé Randy Newman insensible…

La morale du film est que « l’important n’est pas où tu arrives, mais comment tu y arrives ». Qu’en pensez-vous?
Je suis tout à fait d’accord avec cette philosophie en ce qui concerne le travail. Vous vous levez le matin et déjà vous vous sentez mal en pensant à tout le boulot qui vous attend. Vous croyez que vous n’avez pas d’inspiration et que vous allez attendre toute la journée que ça se passe…Et puis soudain, arrive la lumière, une surprise, l’inspiration. Et peu importe comment les choses évolueront, le meilleur moment du processus de création d’une musique, c’est celui-ci. C’est quelque chose que j’ai appris au cours du temps. Cela ne change rien au fait que j’ai toujours une sainte horreur du travail (rires) ! Et pourtant composer, résoudre des problèmes reste ce qui me plaît dans le métier. Une chose encore : songez un instant que CARS est un film familial, donc un film destiné notamment aux enfants et que le propos de ce film est de dire : prenez votre temps, faites-vous plaisir, c’est là que vous toucherez à l’essentiel. C’est une philosophie très sophistiquée, très adulte et très ambitieuse. Je suis très curieux de voir ce que cela donnera auprès des enfants. Je pense que la plupart d’entre eux n’y verront qu’un film amusant. Mais il n’en reste pas moins que le film possède un véritable contenu, incarné notamment par le personnage de Mater. C’est à la fois l’un des plus drôles jamais créés par Pixar, mais aussi celui qui incarne toutes ces valeurs.

Randy Newman : rat des villes ou rat des champs ?
Je préfère de beaucoup lorsque les choses vont doucement. J’ai toujours apprécié les lieux un peu reculés et isolés comme Radiator Springs. J’aime la pêche, les rivières et les forêts. Je ne supporte plus Los Angeles. Je préfère me retirer, à l’écart, pour profiter de choses simples.

Quel type de voiture possédez-vous actuellement ?
J’ai une BWV. Mais plus que la marque, je dois avouer que j’apprécie beaucoup le fait que ce soit une voiture hybride… pour le silence absolu du moteur ! L’idéal pour un musicien !

Tendres remerciements à Christine Blanc.

Special thanks to Randy Newman and Maria Kleinman.

mercredi, décembre 06, 2006

NOËL A DISNEYLAND RESORT PARIS : Entretien avec le show director Emmanuel Lenormand

Comme à chaque Noël, ce ne sont plus seulement les projecteurs qui illuminent les Walt Disney Studios à Disneyland Resort Paris, mais bien les milliers d'étoiles qui scintillent depuis le 11 novembre dans le parc du cinéma, s'ajoutant aux stars bien connues de la maison de Mickey. C'est bien à un nouveau Noël hollywoodien que nous invite encore cette année le show director Emmanuel Lenormand, avec son lot d'animations et spectacles de rue qu'il a su mettre en scène avec le talent qu'on lui connaît.
Mais ce n'est pas tout : il dirige également depuis trois ans du spectacle Mickey et la magie de l'hiver au Chaparral Theater de Frontierland, qui charme petits et grands pour sa neuvième année. Une longévité qui témoigne à coup sûr de la magie d'un show à la fois hilarant et poétique, à propos duquel Emmanuel Lenormand nous a parlé avec une tendresse et une passion communicatives.
Let it snow!
UN NOËL HOLLYWOODIEN AUX WALT DISNEY STUDIOS

Quel est l’esprit de ce Noël aux Walt Disney Studios ?
On reste dans l’esprit d’Hollywood, qui reste le cadre des Walt Disney Studios. Et à Hollywood, il y a bien sûr des acteurs qui jouent le Père Noël. Sauf que, chez nous, c’est un petit peu différent car cet acteur, c’est Dingo ! C’est donc un Père Noël hollywoodien, avec un costume blanc et or, à paillette, et une énorme Cadillac avec plein de jouets dessus, d’où il accueille tous les enfants, à l’entrée du parc ! C’est la première « Christmas touch » !



Les studios scintillent aussi de mille décorations.
C’est un autre style que le Parc Disneyland, très lumineux, plein d’étoiles. Mais l’essentiel des festivités de Noël se déroule dans Studio 1.



C’est en effet le lieu où se déroulent les spectacles de rue.
On y retrouve ainsi Ciné Folies, ce spectacle que j’ai créé il y a quatre ans, que j’ai adapté pour Noël. Il s’agit toujours d’une équipe de tournage qui débarque à Studio 1 avec réalisateur, perchman, acteurs, etc, et qui a besoin de l’aide du public pour tourner une scène car il manque soit un assistant, soit un figurant, etc. Mais pour Noël, j’ai imaginé cinq nouveaux scénarios. Le premier est une publicité kitch comme on en voit en ce moment à la télévision pour des chocolats. Là, on a besoin d’enfants pour jouer des petits lutins, et de plus grands pour jouer les assistants. Il y a ensuite « Christmas Shopping », une scène de grand magazin dans laquelle le comédien est tellement mauvais qu’il faut le remplacer. Dans « Christmas Babies », on montre au grand public comment on fait des effets spéciaux au cinéma puisqu’on a un landau avec de faux bébés, de faux cris et un micro qui déforme la voix. Nous avons « Les Star Sisters chantent Noël ». Les fameuses vedettes des années 50 veulent chanter Rudolph, mais il y a des problèmes : il manque des chanteurs et un orchestre. Comment va-t-on faire ? Et le dernier s’appelle « Cascade en haute montagne », sur un petit pont de bois, dans un univers très bavarois. Deux stars tournent une scène et l’une d’elle refuse de faire sa cascade. Il faut donc trouver sa doublure !…


Cette ambiance bavaroise évoque aussi celle d’Edelweiss.
En effet. Là, ce n’est pas vraiment un spectacle, mais plutôt une ambiance musicale. Les guests sont accueillis plusieurs fois par jour par un orchestre. Il faut dire que j’ai toujours été un très grand fan de La Mélodie du Bonheur ; c’est un peu ma musique de chevet ! Avec cet univers de cinéma, cette ambiance, ces décors, je me suis dit que, pourquoi pas, on pourrait avoir un orchestre habillé en tyrolien qui pourrait interpréter des traditionnels de Noël, en alternance avec les airs principaux de La Mélodie du Bonheur, grand classique du cinéma hollywoodien, très populaire, notamment auprès de nos visiteurs anglais.

D’Hollywood à la Bavière, c’est vraiment un grand écart en termes de style !
En fait, à Hollywood, tout est possible. On a tourné des films sur l’Egypte, sur la montagne, sur la Chine. A partir de là, c’est la porte ouverte à tous les délires. L’important, quand on est dans un studio de cinéma, c’est, à chaque fois qu’on fait quelque chose, de pouvoir donner des références au public. C’est ainsi qu’on entend les premières notes d’un classique, le public sait tout de suite où on l’emmène. C’est la magie du cinéma, et de Studio 1.


Quels furent vos rapports avec Robert Fienga, l’arrangeur et chef d’orchestre du resort ?
C’est moi qui suis allé vers Robert en lui proposant d’arranger les airs de La Mélodie du Bonheur, et c’est en y réfléchissant ensemble que nous en sommes arrivés à la chanson Edelweiss qui donne son nom au spectacle.

MICKEY ET LA MAGIE DE L'HIVER
Venons-en maintenant à Mickey et la Magie de l’Hiver fête ses 9 ans cette année !
C’est un spectacle qui traverse les âges mais qui est toujours aussi populaire. Je l’aime beaucoup car c’est vraiment le divertissement familial dans lequel petits et grands en prennent plein les yeux.


Quels furent ses débuts ?
Tout a commencé un été. A Chaparral Theater, il y avait le rocher de Pocahontas, la grotte, la montagne, etc que l’on retrouve encore aujourd’hui. Le théâtre ayant une grande capacité, on s’est demandé comment l’utiliser toute l’année. Sous la direction du show director Christophe Leclercq, on a donc saupoudré de la neige sur les décors de Pocahontas, on a ajouté un chalet, des sapins, et on a créé ce spectacle, exclusivité de Disneyland Resort Paris, dans le style des comédies musicales des années 50, avec quelques standards comme Let it snow, It’s cold outside ou encore Walking a in a winter wonderland. C’est comme un livre que l’on ouvre sur l’hiver.

Du cartoon à la romance en passant par le western, Mickey et la Magie de l’Hiver est un modèle d’énergie et d’équilibre.
Comme vous l’avez dit, dans ce genre de spectacle, l’équilibre est quelque chose de crucial. Il faut que ce soit vivant, agréable à regarder, divertissant et qu’il convienne à tous les publics. Mickey et ses amis plaisent ainsi à tout le monde, les trois ours apportent la note humouristique, davantage destinée aux enfants, lorsqu’ils essaient de patiner et qu’ils se prennent gamelle sur gamelle, et le duo de patineur fait vraiment appel au patrimoine et à la poésie. C’est la raison pour laquelle je mets un point d’honner à vraiment chercher en amont de bons patineurs. C’est un casting assez difficile à faire car il faut savoir parler anglais et français, être bon comédien et danseur et en plus savoir patiner. C’est encore plus le cas pour les filles car je leur demande des figures bien spécifiques, pirouettes et sauts. Là, c’est vraiment de la technique. On écoute beaucoup la bande audio et il y a un entrainement intensif pendant un mois avant l’ouverture du spectacle dans une salle avec patinoire en backstage. Peut-être que les enfants y sont moins sensibles, mais par contre les adultes vont répondre très positivement à tous ces efforts et tous ces talents.

Quelle fut votre approche quand vous avez repris le spectacle, il y a trois ans ?
J’ai surtout voulu creuser les personnages et installer de vrais rapports entre eux. Quand j’ai écrit le spectacle, je me suis posé toutes sortes de questions en la matière. J’ai également ajouté toutes sortes d’accessoires au fil de ces trois années. Je trouve que cela raconte beaucoup et que cela apporte une vraie valeur ajoutée. L’histoire était claire dès le départ, mais j’ai voulu la rendre encore plus intéressante. Par exemple, quand Dingo s’aventure près de la grotte avec son épuisette, il se la fait arracher, mais on la retrouve à la fin, quand les ours ressortent, ce qui crée une corrélation entre les deux tableaux. Peut-être que certains spectateurs ne le remarquent même pas, mais je pense malgré tout que c’est ce qui rend ce genre de spectacle intéressant.

C’est aussi le fait qu’on découvre à chaque spectacle quelque chose qu’on avait pas vu auparavant qui nous pousse à y retourner !
C’est que, là où, pour un spectacle parisien, les gens y vont une voire deux fois, pour Mickey et la Magie de l’Hiver, on a des guests qui reviennent nous voir très régulièrement.

En tant que metteur en scène, pouvez-vous nous parler de la dimension cartoon de ce spectacle ?
Quand on travaille sur un tel spectacle, l’important c’est de savoir exactement ce que l’on fait et où on le fait. Là, nous travaillons dans un parc Disney. De fait –et c’est toujours le cas avec moi-, les personnages Disney sont toujours mis en avant. Les comédiens qui jouent Max et Kerry sont en fait des faire-valoir de ces personnages. C’est vraiment l’histoire de Donald qui est tranquille dans sa montagne, dans sa forêt, en train de pêcher, et qui va être dérangé par ce couple de vacanciers alpinistes. A partir de là, quand les autres personnages arrivent, il y a tout un travail sur la gestuelle qui est propre à Mickey et Minnie, et sur tous les jeux qu’il y a entre eux. Le succès des personnages vient du fait que les enfants les voient à la télévision tous les jours en vidéo ou en dvd, et il n’est pas rare que la solution d’une mise en scène se trouve dans les films eux-mêmes. Sur scène, il ne faut pas réinventer des choses qui existent depuis plus de trente ans. Je me rappelle, quand j’ai écrit le spectacle Peter Pan à la rescousse pour Adventureland, que j’ai passé des heures à regarder les aventures de Peter Pan et du Capitaine Crochet et à me plonger dans tous leurs dialogues afin que mon spectacle colle le plus possible au film et à l’image que les gens en ont. C’est ainsi que j’ai vraiment été très content quand mon frère est venu voir Mickey et la Magie de l’Hiver et qu’il m’a dit que voir Donald dans ce décor de neige lui rappelait les dessins-animés que nous voyions le dimanche après-midi. Par conséquent, on se doit d’être très attentif à ce genre de détails, notamment pour les enfants, car ils ont une excellente mémoire et souvent ils regardent là où les autres ne regardent pas. Ils voient tout, et c’est pour cela qu’il faut penser à tout si on veut bien s’adresser à eux.


En parlant d’enfants, une autre spécificité de Mickey et la Magie de l’Hiver est d’être un spectacle interactif.
Absolument. C’est une dimension qui avait été supprimée pendant trois-quatre ans et quand j’ai repris le spectacle, j’ai vraiment trouvé cela dommage. Avoir un enfant du public qui monte sur scène, et qui rentre ainsi littéralement dans le film, le tout souvent pris en photo ou filmé par les parents au caméscope, c’est vraiment quelque chose de magique. Pour lui, mais aussi pour les spectateurs car c’est toujours un moment charmant quand l’enfant parle dans le micro. Il peut raconter tout ce qu’il veut et cela s’accompagne souvent d’éclats de rires !

Tout cela donne un spectacle inoubliable et vraiment magique !
Tout à fait, la magie d’un spectacle, ce sont toutes ces surprises qui vous donnent envie d’aller jusqu’au bout en permanence. Au début, ce sont les personnages qui arrivent, puis ce sont les patins, la neige qui tombe et enfin les chevaux. Et puis, nous avons la chance que notre spectacle soit fait par des gens qui aiment vraiment ce qu’ils font, qui aiment vraiment Disney, et c’est une chose primordiale dans le succès d’un tel projet.

Est-ce que votre travail sur cette saison influence votre propre Noël ?
Je dirai avant tout que pour nous, c’est un peu spécial car nous commençons à préparer la saison et à repenser les concepts dès le mois de juillet, mais cela n’empêche pas que j’adore Noël à Disneyland Resort Paris. Main Street est magnifique, il neige tous les soirs, la parade est magique et le château tout illuminé. C’est pour tout cela que je viens très souvent à Disneyland Resort Paris avec des amis un peu avant le Noël en famille, et cela contribue totalement à la magie des fêtes !

vendredi, décembre 01, 2006

LA PARADE DE NOËL A DISNEYLAND RESORT PARIS : Entretien avec le compositeur Vasile Sirli

"Chante, c'est Noël.

Sing along, sing a song of Christmas.

Chante, c'est Noël.

'tis that wonderful time of year!"

Après le succès des festivités d'Halloween, la saison de Noël se déroule cette année du 11 novembre au 7 janvier dans un festival de lumières et de musique, avec comme fil rouge les accents entraînants et scintillants de la désormais célèbre chanson de Vasile Sirli, Chante, c'est Noël!, dont le single a déjà battu tous les records de vente et qui enchante chaque jour les visiteurs du Parc Disneyland et en particulier les spectateur de la fameuse Parade de Noël. L'occasion pour nous d'évoquer avec le compositeur et directeur de la musique du resort l'histoire et les secrets de cette chanson magique...

Monsieur Sirli, quelles sont les origines de Chante, c'est Noël! ?
Tout a commencé il y a trois ans, lorsque nous nous sommes interrogés sur ce que nous allions faire pour 2003. J'étais en Norvège début janvier et j'ai imaginé là-bas une belle chanson de Noël que j'ai voulu noter, mais que je n'ai pu retenir suffisamment longtemps. Cela m'a fortement énervé et je me suis dit qu'il fallait que j'écrive quelque chose dont on puisse se souvenir. Quelques jours après, j'ai écrit un thème que j'ai présenté à mes collègues de la direction artistique. Dès le départ, il était clair pour moi que cette chanson devait être interprétée par des voix d'enfants car j'y suis très attaché. L'impression que je voulais donner était celle d’enfants qui se précipitent dans la cour de récréation et expriment leur choix devant la neige qui tombe. Dès le départ, je savais aussi que le message devait être direct, comme l'est "Chante, c'est Noël!", une sorte d'incitation interactive. En marge de ce concept, nous avons également évoqué la possibilité de baser la parade sur un arrangement d'un chant traditionnel de Noël. Nous avons hésité entre ces deux idées durant tout le printemps, puis, au mois de juin, nous avons définitivement opté pour la maquette que j'avais réalisée quelques mois auparavant. Comme je voulais une approche assez dynamique, j'avais alors fait appel à une section rythmique comme dans une chanson pop. Mais je n'étais pas sûr de cette orientation. C'est pour cela que j'ai préparé plusieurs versions. L'une classique, avec une harmonie ad hoc, l'autre pop, avec des séquences typiques de ce style.

La structure de cette chanson change de la structure pop d'un Dancin' (A Catchy Rhythm).
J'ai en effet opté pour une structure en forme de rondo, simplifié pour les besoins du projet. "Chante, c'est Noël / Sing along, sing a song of Christmas / Chante, c'est Noël / 'Tis that wonderful time of year", n'est donc pas un vrai refrain mais une cellule récurrente. J'ai senti le besoin d'utiliser cette forme car elle permet un renouvellement permanent du matériel, sachant que les chansons traditionnelles de Noël sont assez simples, bipartites. Cela peut vite devenir ennuyeux d'avoir ainsi tout le temps la même chose, en particulier dans cette parade accompagnée d'un bout à l'autre par cette musique. Le rondo permet de relancer le discours et même d'introduire une chanson à l'intérieur de la chanson. Il y a donc presque deux chansons dans Chante, c'est Noël, précisément pour casser le rythme et apporter d'autres couleurs. C'était aussi une façon tout simplement de se faire plaisir.

Et à la fin de la chanson, tout en gardant la même pulsation, on a l’impression que tout s’accélère, avec une accentuation surprenante, à contretemps, formant ainsi une conclusion des plus réussies.
Cela me fait très plaisir d'entendre cela. C'est la partie que j'ai écrite tout à la fin afin de trouver un élément qui puisse étonner, comme la cerise sur le gâteau. C'est une allusion à la musique folklorique, à mes racines d'Europe de l'Est. Mais on retrouve également de semblables accélérations dans la musique classique ou le jazz. C'est donc plus un clin d'œil pour fédérer deux ou trois styles différents, prendre à contrepied l'auditeur et terminer en beauté avec un mini feu d'artifices musical.


Comment cette musique a-t-elle été produite ?
La beauté de cette production, c'est que tous mes collaborateurs, interprètes, orchestrateurs, programmeurs, etc, sont rentrés très vite dans le sujet avec un énorme enthousiasme. C'est ainsi que lorsque j'ai envoyé la première maquette à Jay Smith, l'auteur des paroles, j'ai eu son texte en quasi-totalité dans la demi-heure qui a suivi! Quant à Adrian Enescu, l’arrangeur de certaines variations, il a fallu le réfréner car il multipliait les versions (nous sommes même allés jusqu’au rap !), et il en fut de même pour Doru Apreotesei, mon collaborateur de Stokholm. J'ai ressenti cet enthousiasme jusqu'en Californie car des musiciens et des ingénieurs du son célèbres comme Bill Schnee se sont tout de suite proposés pour travailler sur ce projet.

Une production aussi internationale a dû être complexe à gérer !
Je travaillais en même temps avec la Suède et la Californie. Il est très agréable d'opérer comme cela. Ce fut également un grand plaisir de travailler à Londres avec The Saint George's Chapel Choir du château de Windsor, la chorale de la reine d'Angleterre, des garçons adorables qui ont chanté magnifiquement bien, ainsi que la Maîtrise des Hauts-de-Seine, chœur d’enfants de l'Opéra de Paris et que nous avons enregistré ici dans notre studio. Il y a vraiment eu de la magie autour de cette chanson, et de la chance car tout s'est enchaîné naturellement, sans aucun effort pour avoir la bonne solution.

La couleur du St George's Chapel Choir est très différente de celle du Babette Langford's "The Young Set" de Disney's Toon Circus.
C'est un tout autre type de voix. The Young Set était un chœur mixte composé de garçons et filles de 6-7 ans jusqu'à des jeunes filles de 17-18 ans car les voix plus adultes permettent de mieux fixer la justesse et d'avoir une couleur plus précise. Pour Chante, c'est Noël, je voulais une sonorité plus ronde, avec des voix de garçons. C'est ainsi que je me suis tourné vers un chœur classique. Mais je voulais également un mélange de chorales : l'une anglaise pour le texte anglais et l'autre française pour les passages dans notre langue. Quant aux solistes, Jack et Amarantha, ils ont été proprement étonnants, en particulier Amarantha qui donne toute sa spécificité à la chanson. Enfin, Monica Löfgren est une merveilleuse soliste de Stokolm proposée par Doru. Elle s'est proposée pour faire la démo, et lorsque je l'ai entendue, j'ai trouvé qu'elle était aussi parfaite pour chanter en soliste dans la version finale.
J'ai vraiment cherché à développer le côté enfantin de cette chanson, dans la veine d'It's A Small World, et c’est ainsi que j'ai fait appel à un jeune orchestrateur et compositeur qui travaille beaucoup pour Disney en Californie, Scott Erickson. Nous avions déjà travaillé sur beaucoup de musiques pour le parc comme Dancin' (A Catchy Rhythm). A l'époque, il était assistant de production, le bras droit de Robbie Buchanan.

Chante, c’est Noël s’accompagne de différentes variations, à commencer par celle pour quintette de cuivres, que l’on découvrir plus tard dans la journée, lors de l’illumination du sapin.
Après avoir réalisé mes deux premières démos, je me suis dit que ce serait intéressant de décliner ce même thème pour quintette de cuivres, avec une approche harmonique totalement différente, de type anglo-saxone du début du vingtième siècle, avec un certain néo-classicisme tout en intégrant toutes les conquètes harmoniques opérées à la fin du dix-neuvième, dans l'esprit de Benjamin Britten ou de Paul Hindemith. De plus, il s'agissait de concevoir l'ensemble plus comme une polyphonie à la Jean-Sébastien Bach que comme une harmonie au sens purement vertical du terme, avec des voix qui dialoguent, en y incorporant des notes de passages induisant de petites dissonnances.

Comment avez-vous créé ce merveilleux enchevêtrement de voix ?
J'ai conçu de tête tous ces petits conflits. De plus, j'ai pu compter sur l'aide d'Adrian Enescu, l'arrangeur du quintette. Nous nous sommes toujours connus, nous avons fait nos études ensemble et nous avons travaillé ensemble il y a des années. Il travaille à Bucarest, mais également à Amsterdam ou en Espagne, et la technologie nous permet d'être toujours en contact.

On trouve dans le single de la musique de la Parade de Noël encore deux autres plages que l'on n'entend pas dans le parc, les versions Piano et Dreamy de Chante, c'est Noël!.
Il s'agit d'une sorte de bonus, un cadeau que m'a fait Doru, et j'ai pensé que ce serait une bonne idée de les intégrer dans le single qui fait ainsi plus de 22 minutes. Au début, j'ai pensé à en faire une plage fantôme dans le même style que celle du dernier single d'Halloween (bonus caché en plage 2), puis j'ai finalement préféré l'annoncer. Doru est d'origine roumaine comme moi. Nous avons beaucoup travaillé ensemble et souvent, lors d'enregistrements, nous nous mettions au piano au moment des pauses entre les séances et nous improvisions dans ce style pour nous amuser. En Roumanie, il avait un groupe de jazz-rock, mais aujourd'hui, il vit à Stokholm et est donc plus versé dans le New Age. C'est dans cet esprit qui a élaboré ces deux versions. En ce qui concerne la version Piano qu'il interprète lui-même, il ne s'agissait en rien de sombrer dans un arrangement à la Richard Clayderman, mais il a su concevoir une version simple, pas intellectuelle, "relax". Pour moi, c'est une façon de prolonger la magie quand les visiteurs rentrent chez eux en voiture. J'imagine les enfants tombant de fatigue à l'arrière se laissant bercer par ces musiques que je conçois comme des bisous avant de s'endormir…